vendredi 21 mai 2010

Lapin nain un jour sera grand

C'est terrible. Je n'arrive pas à me concentrer sur ce que je fais. J'ai du taff. Plein. Trop. Mais mon cerveau fait barrage. Je crois que je suis professionnellement usé. Alors je bulle un peu, pour me redonner courage. Entre des échanges de lieux communs sur un chat à forte dominante sexuelle et la consultation de quelques sites musicaux anglo-saxons, je passe faire un tour chez quelques vieilles connaissances que je lis trop peu. Et je tombe sur ce texte, qui d'une certaine façon m'a touché et a fait remonter à la surface quelques souvenirs. Je ne veux pas dire par là que j'ai sexé avec son auteure et que des souvenirs de nos ébats forcément mémorables me reviennent en mémoire, non, je veux dire que j'ai été moi aussi un p'tit lapin. Un p'tit jeune un peu timide qui branche une femme plus âgée que lui, une femme mûre comme l'on dit, sur Internet avec des idées (et des rêves) pas très catholiques derrière la tête. Comme beaucoup d'adolescents, j'ai beaucoup fantasmé sur la femme mûre et initiatrice. Mais à l'époque un ordinateur servait au mieux à jouer à Pacman, pas à trouver des partenaires de fantasme. Flashback donc.

Je dois avoir 23 ans si mes calculs rapides sont bons et elle 38, si ma mémoire est bonne. Une parisienne. Cela tombe bien, je dois justement commencer un stage sur Paris quelques jours plus tard. Ce sont les premiers temps de l'Internet. Elle est je crois la seconde personne avec laquelle je discute en chat. La première fût une névrosée qui cherchait un mec qui accepterait d'écraser ses cigarettes sur elle. Mes premières conversations virtuelles tournent déjà autour de la chose sexuelle. Nous discutons plusieurs soirs d'affilée. Elle me confie avoir à une époque rencontré beaucoup d'hommes via un service minitel. Je suis intimidé mais l'excitation est plus forte que la crainte de ne pas être à la hauteur. Petit à petit l'idée d'un rendez-vous prend forme et se concrétise. Ce sera dans un bar à Bastille.

Pas de téléphone portable - mon dieu j'ai l'impression que ça s'est passé il y a trois mille ans - nous avons donc convenu d'un signe pour nous reconnaitre parmi la foule. C'est elle qui vient à moi. Elle fait plus vieille et moins jolie que sur la photo qu'elle m'avait envoyée. Légère déception. Mais pas suffisante pour rebrousser chemin. Nous nous installons à la terrasse d'un café. Nous restons silencieux un moment, nous observant, nous jaugeant. Avant d'éclater de rire face au ridicule de la situation. Nous nous détendons un peu. Son visage s'éclaircit. La conversation est plaisante mais nous peinons à retrouver cette complicité qui s'était installée d'emblée quand nous étions chacun derrière nos écrans. Elle sent bien qu'il faut faire quelque chose. Elle fait habilement dévier la conversation vers le sujet qui nous a réuni : la baise. Ce qui réveille la bête et aiguise la curiosité de nos voisins de table qui tendent l'oreille avec fort peu de discrétion. Nous nous en amusons. Je fini par lui demander si elle connait un hôtel dans les parages. Elle me dit que cela ne manque pas dans le quartier. Nous nous levons pour régler nos consommations.

Dans la rue nous parlons peu. La situation est excitante. Je bande et je crois que ça se voit. Nous marchons, marchons. Le premier hôtel que nous trouvons est relativement hors de prix pour mon budget étudiant. Mais j'ai tellement faim que je m'en fous. Elle finit par me raisonner. A quelques encablures nous trouvons finalement un petit hôtel plus abordable. J'insiste pour régler. Plus par égo que par courtoisie je crois. La chambre est petite. Propre mais très chichement équipée et décorée. On s'embrasse, on s'enlace, on se déshabille puis elle me fait allonger sur le lit pour prendre mon sexe de jeune premier en bouche. Mais ce moment que j'ai tant fantasmé vire lentement au cauchemar. Elle ne sait pas du tout y faire. Elle ne comprend rien de rien au fonctionnement pourtant simple d'une bite et je débande au fur et à mesure que je sens ses dents remplacer la douceur de ses lèvres. Je réévalue soudain toutes les pipes qui m'ont été faites. Je n'ai pas l'assurance (ou la présence d'esprit, je ne sais plus) pour prendre l'initiative de la guider. Je doute qu'elle eut bien vécu de se prendre une leçon de fellation par un p'tit lapin. Réflexe mâle, je culpabilise de ma déroute érectile. Elle redouble d'efforts. Je suis obligé de lui demander d'arrêter. Malaise.

Tout a été très vite. Au moins je n'ai pas subi l'humiliation de l'éjaculation prématurée. J'ai le temps de l'observer plus en détail et de m'apercevoir qu'elle me plait moyennement. Sa peau est terne. Le petit con fougueux que je suis, habitué aux charmes des chairs fraiches, n'a pas beaucoup de tolérance pour les petites marques de l'âge et de la vie. Elle, de son côté, en a manifestement envie de sa vigoureuse queue de p'tit jeune. Elle se met à me branler. Aussi mal qu'elle suce. Pied au plancher, façon film X. Il y aurait beaucoup à dire sur la façon dont l'industrie cinématographie nous a désappris les gestes les plus simples. Au bout d'une bonne dizaine de minutes nous arrivons enfin à une érection tout à fait correcte. Je lui laisse l'initiative de m'enfiler le préservatif. Mauvaise idée. Elle me tord la queue dans tous les sens, me pince ou je ne sais quoi encore mais le soufflet retombe avant même que je sois totalement couvert. Je commence sérieusement à me sentir minable.

Tout manque incroyablement de sensualité, de joie, de complicité. Et avec ma relative inexpérience je gère mal. Mais il y a une chose que je ne peux lui enlever, c'est cette faculté de ne pas baisser les bras. Elle insiste encore un long moment. Une insistance à laquelle je réponds mollement. Nous finissons par abandonner. Sur le chemin qui nous ramène vers le métro nous ne parlons pas. Nous sommes évidemment tous les deux déçus. Elle se sent probablement humiliée et moi je ne fais pas le fier non plus. Nous nous faisons la bise sur le quai. Ma queue me brule terriblement. J'ai encore beaucoup à apprendre.


Bande son :
Serge Gainsbourg - Ce Mortel Ennui



8 commentaires:

VéroPapillon a dit…

You are alive ! ;o)
J'avais pas vu que tu étais revenu !
Oui on a tous été des p'tits lapins,pines...
Elle est bien touchante cette histoire d'inexpérience. Et toi au moins tu n'as pas été goujat à la fin de la soirée, déjà un bon point !
Bises de papillon

ps : je confirme, on n'a pas couché ensemble (les rumeurs vont si vite sur la blogo, hein !!)

petite française a dit…

Bah oui... l'âge n'est pas gage d'expérience.
Etrange histoire d'homme objet, attendrissante.
B

Anonyme a dit…

Très sympathique cet article !!! Il est vrai que l'age n'a rien à voir... ^^

Sensuella

http://www.blogg.org/blog-87863.html

Kinky a dit…

@ véropapillon :
C'est parce que je suis un garçon discret ;-)
Je n'ai pas été goujat mais je n'ai quand même pas su quoi lui dire et je ne crois pas qu'elle ait gardé un très bon souvenir de cette aventure. Pas la force de lui dire que c'était une catastrophe au lit. Mais ça m'a permis de prendre conscience que l'expérience est un concept abstrait.

ps : oui c'est vrai coupons court aux rumeurs. En même temps c'est pas passé loin. Rires...

@ petite française :
Homme objet. J'ai toujours bien aimé cette expression ;-)
Effectivement l'age n'est pas gage mais quand on est jeune on se crée des mythologies parfois...

@ sensuella:
Merci.
Heureusement finalement.

Fiso a dit…

Ton aventure est très bien écrite et relate ce malaise qu'on a tous vécu, un jour ou l'autre.
Ou quand le réel n'est pas à la hauteur du fantasme.
Le coup des dents, je me suis franchement marré, ça m'a rappelé les mésaventures d'un copain que je me suis fait sur le site de la SPH. Il me racontait les fellations - avec les dents - faites par une petite russe, je crois qu'il a été soulagé qu'elle reparte chez elle.

Je confirme l'erreur de roire qu'âge rime avec expérience. Il s'agit plutôt d'intuition, et surtout d'écoute et d'observation, je crois.
J'ai été bluffée par "un petit jeune" de 28 ans qui m'en a fait voir de toutes les couleurs, il n'y a pas si longtemps, et certains quadras soi-disant expérimentés se sont révélés désastreux (ils s'étaient sans doute trop branlés devant des pornos)

Kinky a dit…

@ fiso :
C'est quoi la SPH ?

J'ai souri en lisant "Un petit jeune de 28 ans".

Fiso a dit…

Vous aurez noté que depuis lui, je mets "petit jeune" entre guillemets ;)

La SPH, nom de code pour un site de rencontres (que j'ai rebaptisé Société Protectrice des Hommes)

Kinky a dit…

@ fiso :
Ah ok... Et quel est le nom de ce site (personne ne nous écoute) ?